Définir la marchabilité est facile, le premier critère est l'existence d'un trottoir conforme aux exigences réglementaires (ie règles PMR).
Par contre, les cyclistes définissent la cyclabilité avec comme premier critère l'existence de pistes cyclables soit-disant pour assurer leur sécurité.
Sauf que cette analyse repose sur un gros biais : le levier le plus efficace pour assurer leur sécurité et donc développer la pratique du vélo est la modération de la circulation automobile (en vitesse et en débit) beaucoup plus que les infrastructures cyclables qui ne sont jamais décisives.
Rapport d’étude de Frédéric Héran http://webissimo.developpement-durable.gouv.fr/IMG/pdf/Rapport_de_recherche_Frederic_Heran_Velo_et_politique_globale_de_deplacements_durables_cle18c7ab.pdf
p 43 « Le bilan des politiques de modération de la circulation sont, en effet, toujours très positifs : forte baisse des accidents les plus graves (de 20 à 30 %), baisse sensible des nuisances, report modal de la voiture vers les autres modes et surtout vers le vélo, on y reviendra (Bonanomi, 1990) » ou p 93, exemple de Strasbourg « Comme partout dans le monde, c’est la modération de la circulation automobile qui a été le principal stimulant de la relance du vélo et non les aménagements cyclables qui ne jouent qu’un rôle de soutien, certes non négligeable, mais jamais décisif ».
Cette étude a été réécrite et est devenu un livre « le retour de la bicyclette » : page 119 (de mon édition de son livre) « Le cas de Dunkerque (200 000 habitants) est particulièrement instructif. C’est l’une des rares villes en France qui a réalisé un réseau de 170 km d’aménagements cyclable digne de ce nom et correctement entretenu. Mais elle n’a jamais vraiment cherché à modérer le trafic automobile. Il est facile d’y circuler partout en voiture, les places de stationnement sont abondantes et les autorités accommodantes quant au stationnement illicite. La ville n’a pas non plus de tramway qui pourrait prendre un peu de place à la voiture. Aussi les cyclistes sont-ils peu nombreux dans cette ville : leur part modale stagnant aujourd’hui aux alentours de 2 à 3 %. » Depuis Dunkerque a mis en place de la gratuité des TC en même temps que 5 lignes de BHNS. Je serai curieux de savoir si la part modale du vélo a augmenté et de combien. Manifestement celle de la marche et des TC a augmenté et celle de la voiture a baissé.
A méditer p 60 : « L’argument écologique n’a donc aucune efficacité. Seule la réduction de l’usage de la voiture est pertinente. Mais un tel objectif est évidemment plus difficile à mettre en avant par les élus. Autrement dit, développer des mesures en faveur du vélo au nom de la préservation de l’environnement cache bien souvent une volonté de ne pas toucher à la voiture. »
Donc pour développer la pratique de la bicyclette, il suffit de modérer le trafic automobile en développant les 2 autres modes de substitution à la voiture.
C’est ce qu’une étude de l’ADETEC démontre, les sites propres pour les TC et les infrastructures piétonnes sont plus efficaces pour augmenter leur part modale (et donc réduire celle de la voiture) que les infrastructures cyclables : http://adetec-deplacements.com/Parts%20modales%20et%20partage%20de%20l%27espace%20dans%20les%20grandes%20villes%20fran%E7aises%20-%20rapport%20%28ADETEC%29%20%284%29.pdf
page 109 : « 1 point d’espace en plus pour la voiture génère une hausse de 1,9 point de sa part modale. Cela montre tout l’intérêt de limiter l’espace accordé à ce mode. »
page 109 : « 1 point d’espace en plus pour la marche génère une hausse de 1,02 point de sa part modale. Cela montre tout l’intérêt de développer les espaces piétons, notamment en élargissant les trottoirs. »
page 110 : « 1 point d’espace en plus pour le vélo génère une hausse de 0,56 point de sa part modale. »
page 111 : « 1 point d’espace en plus pour les bus et trams génère une hausse de 3,1 points de la part modale des transports collectifs dans leur ensemble. Cela montre tout l’intérêt de développer les couloirs de bus et les lignes de tramway. »
Selon moi, il faut intégrer une priorité dans les actions en privilégiant les TC en Site Propre puis la marche. TC en Site Propre qui sont au demeurant prioritaires sur tous les autres modes (c’est le cas du train, du métro (évident puisqu’il est souterrain ou aérien), du tramway mais aussi des BHNS avec leur signalisation de type ferroviaire). Le domaine de pertinence des TC se superposant avec celui de la voiture, en les développant (qui plus est aux dépens de la voiture en terme d’espace) on modère la voiture et de ce fait on permet le développement de l’usage du vélo. Pour la marche, c’est un peu différent, sans trottoir on ne peut pas inciter les automobilistes à faire des trajets de moins d’1 – 1,5 km à pied.
Donc que dire de pistes cyclables faites sur les trottoirs en réduisant la largeur de ceux-ci et donc le confort des marcheurs qui doivent se préoccuper des cyclistes passant à plus de 20 km/h à proximité d'eux ? L'augmentation de la surface allouée aux cyclistes ne va pas augmenter la part modale du vélo par contre la réduction de la surface allouée aux piétons va faire baisser la part modale de la marche.
Donc que dire de l'autorisation faite aux cyclistes d'emprunter les voies réservées aux bus ? L'augmentation de la surface allouée aux cyclistes ne va pas augmenter la part modale du vélo par contre la réduction de la vitesse commerciale des bus va faire baisser la part modale des TC.
Contribution très intéressante. Merci. Elle renvoie à la recherche d'une stratégie pour favoriser une mobilité urbaine durable. Cela doit faire partie des réflexions de notre association. La loi d'orientation a identifié les mobilités actives que sont le vélo et le piéton. La stratégie actuelle de l'Etat est de développer le vélo au nom de la transition écologique. Certes, la France est en retard en la matière mais est-ce une bonne stratégie que d'encourager une mobilité individuelle qui se réalise avec un véhicule ? Le vélo constitue-t-il l’avenir en matière de mobilité urbaine ?
Pour "60 Millions de Piétons", nous devons encourager, me semble-t-il, le duo marche + transports collectifs. C'est de ce qui ressort aussi de la contribution de Christophe. Une difficulté actuelle est qu'il est mal vu, pour ne pas dire plus, de dire que la politique cyclable n'est pas la réponse la mieux adaptée.
D'ailleurs, le monde cycliste en se braquant contre la voiture et en se fixant comme objectif de rivaliser avec elle fait une erreur stratégique car le "tout vélo" conduit à reproduire les mêmes erreurs que le "tout voiture" et au final, c'est le piéton qui en fait les frais.
La gratuité des TC est d'ailleurs une piste qui manque d'évaluation. On lui reproche d'avoir un coût pour le contribuable. Pour autant, réaliser un réseau cyclable et l'entretenir a aussi un coût pour le contribuable. Le réseau automobile a également un coût. Il fut un temps d'ailleurs où il était envisagé d'instaurer un péage urbain.
Les plans mobilité vont bientôt remplacer les Plans de déplacement urbain. Il y aura obligatoirement un volet "marche à pied". C'est déjà un acquis mais il faudra veiller à ce qu'il ne soit pas oublié.
Tout à fait d'accord avec Christian : « le "tout vélo" conduit à reproduire les mêmes erreurs que le "tout voiture" et au final, c'est le piéton qui en fait les frais. »
On a transférer le danger que ressentaient les cyclistes par rapport aux automobiles, vers les piétons.
Ce ne sont pas les cyclistes, en général, qui sont responsables, mais LES AMENAGEURS, municipalités ou agglomérations qui privilégient le « tout vélo au nom de la transition écologique".
« Encourager, le duo marche + transports collectifs » est encore loin d'être dans l'esprit Français. Peut-être si les TC sont gratuits et encore... en TC nous n'avons pas la liberté de nous déplacer comme bon nous semble, ni aller où l'on veut sans avoir à marcher !!!
Le tout vélo a de beaux jours devant lui, surtout avec les vélos cargo qui permettent de transporter autant de marchandises ou d'enfants qu'avec une voiture. Il faut donc de très larges pistes cyclables.... qui se feront, évidemment, au détriment des piétons.
La jurisprudence et la loi sur l'accessibilité nous sont déjà très largement défavorable :
- Jugement de Strasbourg autorisant les pistes cyclables sur les trottoirs ;
- Décision du conseil d'Etat autorisant les maires à faire stationner les véhicules sur les trottoirs ;
- 1,40m minimum, (loi 2005-102) de cheminement est devenu 1,40m MAXIMUM pour beaucoup d'aménageurs ;
Pour moi si ces arguments restent d'actualité, inutile de chercher une soit-disant définition du trottoir, nous serons toujours les dindons de la farce.
Afin d'obliger les aménageurs à respecter les piétons donc la loi, nous devons arriver à faire indiquer dans les différents textes législatifs, les besoins des piétons, et surtout indiquer que les autorités, maires ou présidents d'agglo, ne sont pas autorisés à y déroger. AUCUNE EXCEPTION.
Je n'y crois pas trop malheureusement.
En ce qui concerne les cyclistes … à eux de défendre leurs intérêts.
Cette opinion sur les définitions de la marchabilité et de la cyclabilité est intéressante mais ne recoupe apparemment pas l'opinion générale exprimée dans les baromètres des villes marchable et des villes cyclables.
Pour la plupart des répondants au baromètre des villes marchables ce n'est pas l'existence de trottoirs qui est déterminante mais l'absence d'empiètements, d'encombrements et d'obstacles, puis le danger (pour lequel l'existence d'un trottoir est certes une réponse, mais partielle).
En ce qui concerne la cyclabilité j'aime assez la définition du site https://cyclabilite.droitauvelo.org :
- qualité et la pertinence des aménagements cyclables
- densité et la vitesse du trafic automobile
- qualité du revêtement de la voie
On n'y voit pas mention de pistes cyclables mais d'aménagement pertinents (les pistes cyclables peuvent l'être, mais seulement dans certains cas).
Pour les critères de marchabilité, je suis d'accord que ce qui vient en premier c'est plutôt ce que vous dites, la plupart des personnes s’accommodant d'un trottoir de même 60 cm de largeur. C'est à nous de faire infuser qu'un trottoir doit être conforme aux prescriptions réglementaires que cela est bien pour tout le monde à commencer pour les valides par la possibilité de marche à plusieurs de front. C'est triste de devoir constater que quand je marche avec ma compagne bien souvent on ne peut pas échanger alors qu'on pourrait le faire si on faisait le trajet en voiture.
A contrario, pour les critères de cyclabilité, ce qui vient en premier c'est bien l'existence de pistes (la majorité des associations cyclistes n'aiment ni les bandes ni les CVCB), là aussi c'est à nous de faire infuser que le premier levier pour assurer leur sécurité c'est bien le second point que vous citez. Concernant le troisième point, on en vient à l'aberration que le GR 65 (chemin de Saint Jacques de Compostelle donc très ancien) a été revêtu d'un enrobé entre Moissac et Pommevic, beaucoup moins confortable pour les randonneurs, avec la création de la voie verte du canal latéral à la Garonne (ancien chemin de halage maintenant interdit aux cavaliers pour la sécurité des cyclistes, un comble).
Sur le revêtement, voir la position de France Nature Environnement citée par l'Association Française des Voies Vertes et Véloroutes (avec des jolies photos de voies vertes en stabilisé) : https://www.af3v.org/quels-revetements-pour-les-voies-vertes/
Le stabilisé est beaucoup plus agréable que l'enrobé ... quand il est neuf. Après le premier hiver c'est déjà moins évident. Après le deuxième hiver c'est souvent plutôt le contraire.
Et oui les vélo détruisent les chemins quand ils ne sont pas en enrobé. On a le même problème en montagne, des randonneurs peuvent passer sur un chemin sans le détruire, le passage de quelques vélo suffit à le détruire.
C'est bien pour cela que les départements mettent en place de l'enrobé (voir la photo jointe prise en mai 2023 près de Moissac).
Egalement la pluie, le gel, les véhicules d'entretien, les chevaux, etc.
Je ne pense pas qu'on utilise du stabilisé sur les chemins de montagne. Le problème est donc différent.
Un exemple :
On voit parfaitement sur la terre à gauche, la façon dont les vélos "détruisent les chemins". Rien à voir avec ce qui s'est passé sur le stabilisé.
Sur votre exemple, la piste en stabilisé reste utilisable par les piétons en contournant les flaques mais dès que la pelouse a été détruite par les vélos, le terrain devient glissant et inutilisable par les piétons.
Rien ne dit que la piste en stabilisé n'a pas été détruite par les vélos.
"utilisable par les piétons en contournant les flaques" ????? Comment faites-vous pour contourner les flaques sur "le stabilisé"???? en marchant dans la boue évidemment!!!
"utilisable par les piétons en contournant les flaques" ????? Comment faites-vous pour contourner les flaques sur "le stabilisé"???? en marchant dans la boue évidemment!!!
Sur la photo de Michel, il y a un piéton qui est passé à droite sur une bande étroite non dégradée par les vélos. Vu le nombre de traces de vélo, il ne fait aucun doute que le stabilisé a été dégradé par les vélos par ornièrage.
C'est ce qui se passe sur une voie verte près de chez moi, le stabilisé est dégradé par les vélos.
Et aussi par les piétons, les poussettes, les véhicules d'entretien, les chiens, les caddies de courses, les trottinettes, la pluie, les fauteuils roulants, la grêle, les scooters, beaucoup le gel. Je n'ai pas l'impression que des chevaux passent à cet endroit mais sur les voies vertes qui leur sont ouvertes leur impact est dans les 100 fois plus important que celui des vélos.
"chevaux" "leur impact est dans les 100 fois plus important que celui des vélos".
Et entre un piéton et un vélo quelle différence d'impact ? Pour mémoire, je dis que les vélo détruisent les chemins quand ils ne sont pas en enrobé, ce qui est inévitable pour deux raisons :
- la surface de contact de deux pneus est très inférieure à celle d'une semelle donc le poinçonnement est bien supérieur, donc l'impact bien plus grand, qui plus est la même personne est plus lourde sur son vélo qu'à pied - pour quelqu'un de 75 kg - 7,6 kg/cm² (avec le vélo, le casque, etc.) versus 0,3 soit 25 fois plus,
- la différence de vitesse est aussi impactante, dans les dimensionnements de chaussée on prend en compte la vitesse de déplacement, un même chargement est beaucoup moins impactant en statique qu'en dynamique. Un piéton qui marche s'apparente beaucoup plus à des charges statiques.
Vous devriez faire le même calcul entre un cheval et un vélo pour l'appréhender. Cheval qui a toujours 2 pattes par terre et qui à l'allure du pas file à environ 8 km/h.
Mais vous pouvez toujours refuser de voir que ce sont majoritairement bien des cyclistes qui ont détruit la voie verte de votre exemple.
Et puis un vélo sur 100M , par exemple, utilise 200M de terrain (2 roues, 200%) alors qu'un piéton chaussant du 42 utilise 30cm de terrain par pas d'environ 70cm (42%). donc plus de 4 fois moins. Evidemment qu'un vélo abîme plus un sol qu'un piéton !!!